Bibliographie
Elizabeth Fischer et Catherine Lepdor (dir.), Modes et tableaux. Œuvres de la collection et costumes de 1700 aux années folles, Les Cahiers du Musée des Beaux-Arts de Lausanne n° 10, 2000, n° 27.
Von Anker bis Zünd. Die Kunst im jungen Bundesstaat 1848-1900, cat. exp. Zurich, Kunsthaus Zürich, 1998.
Dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’Oberland bernois attire nombre de touristes pour lesquels les petits maîtres locaux gravent et enluminent à la chaîne des vues pittoresques exaltant l’image d’une Suisse demeurée attachée à ses coutumes et à ses costumes. L’opposition entre la vie citadine et la vie à la campagne, pour simpliste qu’elle soit, continue à fonctionner cinquante ans plus tard lorsque Girardet envoie au Salon parisien des sujets suisses qui lui valent ses premiers succès. L’artiste neuchâtelois né en France marche sur les traces de la peinture alpestre genevoise.
Installé à Brienz dès 1845, Girardet signe alors ses œuvres les plus personnelles, inspirées de la vie au village ou encore, comme ici, de la geste des bergers. Dans ce tableau représentant une désalpe, il reconduit au premier plan le schéma pyramidal hérité de son compatriote le peintre Léopold Robert. Il dynamise cependant sa composition en creusant la profondeur du second plan, avant de refermer l’espace sur une nuée qui laisse apercevoir les Alpes.
Animé d’un souffle romantique, Girardet s’intéresse moins au pittoresque des costumes qu’à la dramatisation de la scène. L’orage imminent assombrit le ciel et fait se presser sur le flanc de la montagne l’interminable troupeau des vaches et des moutons. Le groupe au premier plan franchit un col et se retrouve exposé au vent qui menace d’arracher son chapeau à la petite fille. Une percée de soleil illumine la silhouette gracile de l’enfant, symbole d’une innocence que vient renforcer la présence d’un agneau dans ses bras. La facture méticuleuse et la sentimentalité un peu mièvre de cette toile évoquent avant l’heure l’univers de Heidi, romans de la Zurichoise Johanna Spyri qui répandront dans le monde entier la vision transfigurée d’une vie en osmose avec la nature.