Amédée Ozenfant
Le Violon rouge, 1919 - 1929

  • Amédée Ozenfant (Saint-Quentin, 1886 - Cannes, 1966)
  • Le Violon rouge, 1919 - 1929
  • Huile sur toile, 53 x 44,3 cm
  • Acquisition, 1995
  • Inv. 1995-193
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, Ozenfant et Charles-Édouard Jeanneret (Le Corbusier) cosignent Après le cubisme (1918). Ce manifeste du purisme promeut le refus de toute représentation désordonnée, qu’elle intègre la dimension temporelle comme l’impressionnisme ou le futurisme, l’imaginaire débridé comme le dadaïsme, ou encore les dérives décoratives des épigones du cubisme. Le nouveau langage entend se calquer sur la civilisation industrielle : les tableaux obéiront désormais à des « schémas d’objets prototypes ayant atteint un haut degré d’invariabilité ».

Dans Le violon rouge, réplique réduite de moitié d’une œuvre de 1918-1919, Ozenfant convoque allusivement le cubisme : au lieu d’un objet produit en série, l’artiste réintroduit ici le violon, objet artisanal, et motif prisé au début des années 1910 par Braque et Picasso.

Si le purisme prône la représentation frontale des objets dans un espace quasi abstrait, l’artiste tempère ici son intransigeance. Il opte pour un point de vue surélevé et fonde sa composition sur des obliques qui réintroduisent un léger sentiment de profondeur. Les objets de sa nature morte sont disposés sur les quatre côtés d’un losange : une table, un violon et son étui, une bouteille, des cartes à jouer, un verre à pied cannelé, une pipe, un livre et une feuille de papier. Ce ne sont plus les ombres portées qui renforcent les relations spatiales entre les objets, mais le croisement à angle droit de leurs lignes de contour : sans ancrage univoque, ils semblent échapper à l’attraction terrestre. La bande horizontale au bas du tableau – moderne prédelle qui accueille la signature – et le panneau d’une boiserie encadrent et stabilisent l’ensemble. Les rimes plastiques entre la feuille de papier, le galbe du violon et ses ouïes, entre le fond de la bouteille et les volutes de l’instrument animent ce tableau maintenu dans « la grande gamme » des rouges, terre, blanc et noir définie par les puristes.

Bibliographie

Pierre Guénégan, Amédée Ozenfant, 1886-1966. Catalogue raisonné, St Alban, Lanwell & Leeds Ltd, 2012, n° 1929/006.

Françoise Ducros, Ozenfant, Paris, Cercle d’Art, 2002.

Amédée Ozenfant, cat. exp. Saint-Quentin, Musée Antoine Lecuyer, Besançon, Musée des Beaux-Arts, Mâcon, Musée des Ursulines, 1985.