Albert Anker
Les Petites Brodeuses, 1875

  • Albert Anker (Anet, 1831 - 1910)
  • Les Petites Brodeuses, 1875
  • Huile sur toile, 81,2 x 68,4 cm
  • Legs du Dr Adolphe Combe, 1917
  • Inv. 689
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Ce tableau offre une illustration exemplaire de la manière dont les peintres suisses installés à l’étranger adaptent leur production en fonction des marchés qu’ils cherchent à conquérir. Anker accomplit sa formation dans l’atelier parisien du Vaudois Charles Gleyre au début des années 1850. En 1875, année où il peint cette œuvre, il séjourne alternativement boulevard Montparnasse et dans son village natal d’Anet. Sa réputation repose sur ses envois au Salon de Paris où il expose régulièrement depuis 1859, et sur le travail de diffusion de ses marchands, à Paris Adolphe Goupil, à Londres les Anglais Tooth et Wallis.

L’artiste bernois s’est spécialisé très tôt dans la peinture de genre, avec une prédilection pour le monde de l’enfance. De ce registre restreint, il offre plusieurs variations. Certains tableaux ont pour cadre son village natal en Suisse, avec cette touche de pittoresque ethnographique qui séduit les amateurs. D’autres, sous l’influence de l’enseignement académique de Gleyre, tentent la transposition dans l’Antiquité (Les joueurs d’osselets, 1868, Bulle, Musée gruérien). Ici, avec ces Petites Brodeuses, Anker se met au diapason du goût pour les peintres du XVIIIe siècle qui se répand en France à la suite des écrits des frères Goncourt. On vénère Jean Antoine Watteau, François Boucher et Nicolas Lancret, mais aussi Jean Siméon Chardin, dont le réalisme et l’austérité rejoignent les idéaux d’Anker qui s’en inspire.

Le peintre note dans son Livre de vente qu’il a costumé ses modèles de robes Louis XV. Le fond dense et sombre découpe les silhouettes des fillettes. Osier, soies, dentelles, cotonnades et écheveaux de laine sont représentés avec une maestria qui culmine dans le damier rouge, exercice de broderie auquel la cadette s’applique sous l’œil attentif de son aînée.

Bibliographie

Matthias Frehner, Therese Bhattacharya-Stettler et Marc Fehlmann, Albert Anker und Paris, cat. exp. Berne, Kunstmuseum Bern, 2003, n° 14.

Sandor Kuthy & Therese Bhattacharya-Stettler, Albert Anker, 1831-1910, Catalogue raisonné des peintures et des études à l’huile, Kunstmuseum Bern & Wiese Verlag Basel, 1995, n° 207.