Paul Klee
Am Nil, 1939

  • Paul Klee (Münchenbuchsee, 1879 - Muralto, 1940)
  • Am Nil, 1939
  • Peinture à la colle sur papier marouflé sur toile de jute, 75 x 125 cm
  • Don anonyme, 2011
  • Inv. 2011-200
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

En quatre petites semaines, du 17 décembre 1928 au 17 janvier 1929, Klee parcourt l’Égypte, visitant Alexandrie, Le Caire, Louxor et Assouan. Il n’en rapporte que deux dessins répertoriés, mais recueille une foison d’impressions auxquelles il donnera forme bien plus tard, entre 1937 et 1940, année de sa mort. Tout comme son voyage en Tunisie en 1914 avec August Macke et Louis Moilliet, ce court périple égyptien le marque profondément.

Sur fond de contrastes de couleurs chaudes et froides – bleu-vert boueux et ocre sombre –, d’interpénétration d’eau et de terre, Am Nil (Au bord du Nil) déploie des pseudo-hiéroglyphes noirs en une ligne continue, sous deux barres en guise d’une ligne d’horizon qui serait placée très haut. Ces signes figurent un bœuf, un semeur, un papyrus, deux barques et la roue à aubes d’une noria, cette pompe hydraulique primitive avec sa fourche caractéristique à laquelle est attachée un bœuf qui fait tourner la roue. L’œuvre est une des plus grandes peintures que Klee ait jamais réalisées, ce qui atteste l’importance à la fois « épique » et personnelle que l’artiste lui accorde.

Rentré à Berne pour fuir les nazis et rongé dès 1936 par une sclérodermie qui lui sera fatale, Klee se lance dans une production frénétique culminant en 1939 avec la création de mille deux cent cinquante-trois œuvres où les réminiscences égyptiennes servent à sublimer l’angoisse de la mort. Les motifs développés dans Am Nil s’inspirent en effet du symbolisme du Livre des morts de l’Égypte antique : la barque préfigure le passage « de l’autre côté », vers un jour nouveau, la roue à aubes et la semence promettent l’éternel retour. Klee – dont les initiales sont cachées partout dans ce tableau – écrit son propre Livre des morts.

 

Exposé actuellement

La collection

Bibliographie

Sara Pliess, « Späte Einflüsse aus Ägyten – Klees Werk nach der Reise », in Paul Klee. Die Reise nach Ägypten 1928/29, Dresde, Sandstein, 2014, p. 116-161.

Michael Baumgartner, Carole Haensler et alii, À la recherche de l’Orient. Paul Klee, tapis du souvenir, Ostfildern, Hatje Cantz, 2009.