Bibliographie
Jean-Paul Bouillon (dir.), Maurice Denis, cat. exp. Paris, Musée d’Orsay, Paris, RMN, 2006, n° 78.
Gloria Groom, Beyond the Easel : Decorative Painting by Bonnard, Vuillard, Denis, and Roussel, 1890-1930, cat. exp. Chicago, The Art Institute of Chicago, New York, The Metropolitan Museum of Art, New Haven, Londres, Yale University Press, 2001, p. 204-207, n° 60.
Jean-Paul Bouillon, « Du jardin à la plage: deux peintures nouvelles de Maurice Denis au Musée des Beaux-Arts de Lausanne », in De Vallotton à Dubuffet : une collection en mouvement, acquisitions, dons, prêts, Les Cahiers du Musée des Beaux-Arts de Lausanne n° 5, 1996, p. 21-28.
Présentée en 1906 au Salon de la Société nationale des beaux-arts et acquise en 1907 par Eugène Boch, le frère la célèbre peintre et mécène belge Anna Boch, cette toile de grand format est l’une des plus complexes de la série des plages inaugurée en 1898 par Denis avec Baigneuses, Perros (New York, The Museum of Modern Art). Elle s’inscrit dans le « moment classique » de l’artiste, période qui suit sa découverte des œuvres de Raphaël à Rome. Ses couleurs se font alors plus lumineuses, acides, électriques, et ses compositions plus strictes. Un soleil éblouissant vient brûler ses vues de la Bretagne, sa terre d’élection dès ses années nabies.
Baigneuses représente le site des Grands Sables, au Pouldu (Finistère). Parmi les plages peintes par Denis, celle-ci désigne l’océan moins comme un lieu maternel qui aurait donné naissance à la civilisation que comme le théâtre d’une union spirituelle avec la nature, ritualisée par la plongée dans les flots. Tout ici est tourné en direction de la mer: la côte, largement ouverte et terminée par un temple grec; la cohorte de femmes nues et d’enfants qui la contemplent par triades; le bateau qui s’élance sur ses flots.
L’œuvre est syncrétique par son mélange d’éléments antiques mais aussi modernes, jusqu’à la présence de Marthe, l’épouse du peintre, modèle du nu tout à gauche. De part et d’autre des deux figures installées dans l’axe médian – renforcé par le rouge d’une robe et d’un bonnet –, les corps nus et drapés alternent, affichant une plasticité proche des sculptures d’Aristide Maillol. Décorative dans son rythme et dans les arabesques de l’écume, recourant à la touche pointillée, Baigneuses intègre la vivacité de la palette fauve d’un Matisse en calmant le jeu. Elle digère dans sa composition l’art tempéré des Grandes Baigneuses de Cézanne (1894-1905, Philadelphie, Museum of Art).