Bibliographie
Albert Marquet : peintre du temps suspendu, cat. exp. Paris, Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, 2016, Paris Musées, 2016.
Marquet, cat. exp. Lodève, Musée de Lodève, Milan, Electa, 1998.
Marcelle Marquet, Albert Marquet, Paris, Hazan, 1955.
Marquet a toujours eu une prédilection presque obsessionnelle pour l’eau. Il ne s’intéresse toutefois aucunement aux sites exceptionnels ou aux vues remarquables. L’eau qui capte son intérêt est celle qui constitue elle-même le paysage, qui en est l’essence : les eaux calmes des ports et des baies, le lent cheminement des rivières et des fleuves.
Durant l’été 1925, Marquet se rend en Norvège accompagné de son épouse Marcelle, à Oslo puis à Hesnès où le couple a loué une maison au milieu de jardins et de laquelle « il voyait une mer parsemée d’îlots. Une côte rocheuse qui supportait des maisons de bois peint en rouge ». « Nous vivions sans discrétion. Pêche, bains, promenades et travail régulier composaient notre vie », rappellera son épouse. L’artiste multiplie les excursions dans la région, notamment à Grimstad, où il peint cette toile.
Ici, Marquet a immédiatement su capter la netteté intense de la lumière caractéristique des pays nordiques et rendre les particularités du site, un petit port de pêche à l’entrée d’un bras de mer. Dans cette œuvre, où le peintre pousse à l’extrême le minimalisme, il reprend nombre de ses procédés favoris : vue en surplomb, plongeante au premier plan, puis redressée dès le centre de la composition, horizon surélevé et barré par des montagnes, formes cernées de noir, indication sommaire du mouvement de l’eau.
Ce tableau montre qu’en s’affranchissant du fauvisme, Marquet n’a pour autant pas abandonné les effets de couleurs. À l’étendue de l’eau délibérément atone et pâle, sur laquelle seul le trait vient faire accent et créer espace, s’opposent les rouges orangés des constructions et les verts profonds des arbres, révélés dans leur densité par la lumière franche d’un jour de grand beau temps.