Alice Bailly
Les rythmiciennes, 1918-1919

  • Alice Bailly (Genève, 1872 - Lausanne, 1938)
  • Les rythmiciennes, 1918-1919
  • Laine, soie, papiers collés et encre sur toile, 82 x 66,5 cm
  • Don du Comité de la Fondation Alice Bailly, 1957
  • Inv. 1957-006
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Publiée en 1918 par Albert Rheinwald, la première monographie consacrée à Bailly insiste sur l’originalité de ses travaux les plus récents : « […] la laine devient sous nos yeux matière précieuse, expressive et vivante à l’égal de l’huile, du pastel, du marbre ou de l’or. » Bailly n’admet aucune hiérarchie entre ses peintures à l’huile et ses « tableaux-laine » : à ses yeux, cette technique novatrice ne fait qu’étendre le registre de ses moyens d’expression. « Qu’on ne vienne donc pas nous parler d’art appliqué ! », insiste Rheinwald qui mesure le risque pris par l’artiste lorsqu’elle expose ses travaux à l’aiguille, elle qui a tant bataillé pour s’imposer au même titre que les hommes dans le milieu des beaux-arts.

Bailly réalise ses premiers tableaux-laine en 1916 à Genève. Les rythmiciennes montre un spectacle de danse violemment éclairé au premier plan. En arrière-plan, deux danseuses aux jupes et coiffures courtes déploient un éventail de mouvements expressifs inspirés des chorégraphies du Genevois Émile Jaques-Dalcroze, le promoteur de la rythmique. L’essentiel de la surface est interprété en fils de couleurs sourdes et pastel. La laine mate est réservée aux costumes et aux décors, la soie brillante aux parties dénudées des jambes et des bras. Pour la danseuse principale, Bailly recourt aussi au collage avec les papiers doré et argenté du justaucorps ; son visage est précisé à l’encre noire, le tracé de ses yeux et de son nez imitant le point de surjet !

Pour cette composition, Bailly s’est inspirée d’un spectacle de Lucienne Rouché, fille du directeur de l’Opéra de Paris Jacques Rouché, épouse du peintre Valdo Barbey. L’œuvre offre un nouveau témoignage de l’intérêt constant de l’artiste pour la danse, depuis le portrait de Jacqueline Marval au Bal Van Dongen (1914, collection privée) jusqu’à ses dernières grandes peintures pour le foyer du Théâtre municipal de Lausanne (1936).

Bibliographie

Paul-André Jaccard, Alice Bailly. La Fête étrange, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Milan, 5 Continents Editions, 2005, n° 141.

Albert Rheinwald, L’Art d’Alice Bailly. Avec un poème de Henry Spiess, Genève, Galerie Moos, 1918.