Bibliographie
Catherine Lepdor et Isabelle Cahn (dir.), Maurice Denis. Amour, Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Paris, Éditions Hazan, 2021, n° 58-70 [Laurence Schmidlin].
Catherine Lepdor, « Sleeping Pictures. Sur quelques représentations de La Belle au Bois Dormant au XIXe siècle », in Le Sommeil ou quand la raison s’absente, Les Cahiers du Musée des Beaux-Arts de Lausanne n° 9, 1999, p. 34-47, n° 37.
Pierre Cailler, Catalogue raisonné de l’œuvre gravé et lithographié de Maurice Denis, Genève, Éditions Pierre Cailler, 1968, n° 108.
Allégorie est la lithographie inaugurale d’Amour, un album commandé à Denis par l’éditeur et marchand d’art Ambroise Vollard en 1892. En 1899, date de sa publication, le recueil totalise treize compositions (une couverture et douze planches) qui racontent les épisodes de la passion éprouvée par l’artiste pour Marthe Meurier. Les légendes qui accompagnent les images sont inspirées de son Journal et des textes réunis sous le titre Amours de Marthe, rédigés au temps des longues fiançailles qui précèdent leur mariage en 1893.
Allongée sur un divan, Marthe, une rose à main, s’évade avec bonheur dans le sommeil, lovée dans le nid douillet d’une serre envahie de fleurs mauves. La place liminaire occupée par Allégorie, tout comme son titre, lui donnent un statut particulier. Avec la représentation de cette jeune femme endormie que vient couronner une suivante, Denis donne une indication de caractère pour guider l’interprétation de l’album, comme le ferait un compositeur. Cette indication est renforcée par la légèreté du trait, par l’évanescence des formes et par la gamme chromatique pastellisée qui, ensemble, contribuent à installer un sentiment de rêverie silencieuse.
Denis nous invite ici à fuir dans le rêve, comme les nombreuses adaptations du conte de La Belle au bois dormant qui se multiplient à cette époque sous la plume des symbolistes et des décadents et parlent d’une princesse qui refuse de se réveiller, préfère se rendormir après le baiser du prince, ou encore choisit de mourir plutôt que d’affronter la réalité. En 1892, il avait réalisé dans le même esprit les décors d’une pièce de Gabriel Trarieux, Le Songe de la Belle au Bois, conte de fées en cinq actes. Il avait peint aussi deux tableaux, Belle au bois d’automne (collection particulière) et La Dormeuse (Bayonne, Musée Bonnat-Helleu).