Kader Attia
Culture, Another Nature Repaired, 2014

  • Kader Attia (Dugny, 1970)
  • Culture, Another Nature Repaired, 2014
  • Bois et support métallique, 221 x 50 x 50 cm
  • Acquisition, 2015
  • Inv. 2015-140
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Depuis près de vingt ans, Attia s’intéresse à la question de la réparation, comprise dans sa double acception de réparer – un objet, une blessure –, et de rendre compte de cette même blessure. D’où l’importance, dans son travail, de l’objet et de l’archive comme traces tangibles de l’Histoire et des blessures qui exigent réparation. L’espace de l’installation devient dès lors un espace mémoriel, mais aussi un espace pour repenser les liens intrinsèques entre des histoires – politiques, personnelles, esthétiques – apparemment distinctes.

La série de bustes Culture, Another Nature Repaired (2014), dont le Musée possède trois exemplaires, a été créée en collaboration avec des artisans à Bamako (Mali) et à Brazzaville (République du Congo). Conçus d’après des photographies de « gueules cassées » de la Première Guerre mondiale, ils proposent une autre lecture des transferts et des échanges culturels entre les continents africain et européen, dans la continuité de l’œuvre monumentale imaginée par Attia pour la dOCUMENTA (13), The Repair from Occident to Extra-Occidental Cultures en 2012. En effet, si ces bustes rappellent que les grands modernes de l’histoire de l’art occidental se sont inspirés de l’Autre – tant les expressionnistes allemands que des artistes comme Braque et Picasso étaient fascinés par la statuaire africaine –, ce dernier jette aujourd’hui en retour son propre regard sur l’Homme occidental dans toute sa sauvagerie destructrice.

Si l’on se souvient que la Grande Guerre fut « mondiale », que de nombreux pays belligérants étaient des colonisateurs de l’Afrique noire et du Maghreb et qu’ils y recrutèrent un nombre considérable de soldats, qu’après la Grande Guerre, les conséquences à plus ou moins long terme sur les pays colonisés furent désastreuses, la proposition d’Attia prend tout son sens. À travers son travail, l’artiste pose ainsi la question de savoir ce qui peut être fait aujourd’hui pour réparer l’Histoire.

Bibliographie

Nicole Schweizer (éd.), Kader Attia, Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Zurich, JRP Ringier, 2015.

Léa Gauthier (éd.), Kader Attia. RepaiR, Paris, Blackjack éditions, 2014.

Axel Lapp (éd.), Kader Attia. The Repair From Occident to Extra-Occidental Cultures, Berlin, The Green Box, 2014.