Félix Vallotton
Les Affiches lumineuses.
Dessin pour « Les Rassemblements », 1895/1902-1903

  • Félix Vallotton (Lausanne, 1865 - Paris, 1925)
  • Les Affiches lumineuses.
    Dessin pour « Les Rassemblements », 1895/1902-1903
  • Crayon, plume et encre de Chine, rehauts d’aquarelle sur papier, 26 x 20,7 cm
  • Acquisition, 2013
  • Inv. 2013-019
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Vallotton réalise à l’automne 1895 une série de trente dessins pour Badauderies parisiennes. Les Rassemblements. Physiologies de la rue, un ouvrage publié en 1896 et tiré à deux-cent-vingt exemplaires pour les membres de la Société des bibliophiles indépendants. L’artiste répond à une commande de l’éditeur Octave Uzanne qui adopte une démarche originale : il ne demande pas à Vallotton d’illustrer un texte, mais à quinze collaborateurs de La Revue blanche de commenter ses dessins. Parmi ces écrivains figure la fine fleur de ce périodique d’avant-garde, entre autres Jules Renard et Félix Fénéon.

Vallotton poursuit ici la veine de ses gravures sur bois nabies : formes synthétiques emboîtées, perspectives étagées inspirées de l’estampe japonaise, cadrage dans le vif du sujet. Le phénomène des foules attroupées dans les rues et les parcs parisiens est observé dans toute son ampleur : promeneurs, forains, ivrognes, manifestants… Vallotton excelle à croquer les évènements qui, de jour et de nuit, provoquent un « rassemblement », mêlant joies (chanteurs de rue, défilé militaire, envol de ballons) et drames (arrestation, incendie, noyade). Plus qu’une succession de saynètes, c’est la puissance larvée de ces « coagulations » populaires, la montée en force du mouvement social à l’époque de la Troisième République qui sont décrites, non sans humour parfois !

Ce dessin, aquarellé par Vallotton au moment de le vendre, est consacré à l’affichage moderne de la publicité. Il montre une foule se bousculant la nuit devant une vitrine. Il y a là les incontournables du boulevard parisien : derrière, deux petits pâtissiers, un voyou les mains dans les poches, deux belles de nuit et un groom en casquette ; devant, des bourgeois coiffés de hauts-de-forme. Tous se pressent pour admirer le spectacle magique des placards violemment éclairés. Comme l’écrit Romain Coolus dans le texte qui accompagne cette composition : « À tout ce petit monde […] les affiches lumineuses donnent gratuitement la lanterne magique. »

Bibliographie

Richard S. Field, « Extérieurs et intérieurs : l’œuvre gravé de Vallotton », in Sasha M. Newman (dir.), Félix Vallotton, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Paris, Flammarion, 1992, p. 43-91.