Jean Dubuffet
Paysage aux murailles, 1952

  • Jean Dubuffet (Le Havre, 1901 - Paris, 1985)
  • Paysage aux murailles, 1952
  • Huile sur isorel, 92 x 122 cm
  • Donation de Mireille et James Lévy, issue de leur collection d’art Jean Dubuffet, 2019
  • Inv. 2019-024
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

En novembre 1951, Dubuffet s’installe pour six mois à New York. Sur place, il peint plusieurs tableaux dont ce Paysage aux murailles qui rejoindra les murs de la célèbre galerie de Pierre Matisse, artisan de sa fulgurante carrière outre-Atlantique. À cette époque, Dubuffet recouvre la toile de couches épaisses comme des mastics : de la peinture à l’huile chargée de plâtre, de craie, ou de colle, puis recouverte de vernis. Ce matériau presque vivant, fait de sillons, de cloques et de boursouflures, envahit la totalité de la surface du tableau. Il y surgit un monde complexe et inattendu qui semble tout à la fois être le produit d’une existence physique et naître de notre imagination. « Vagations et chimères de l’esprit ? Ou remuements des sols ? », se demande le critique d’art Max Loreau. De cette association surgit un univers accueillant tous les possibles, ceux issus de la terre comme ceux engendrés par la pensée, un macrocosme filandreux que notre œil parcourt et dans lequel il s’abandonne ou se perd. L’organisation du tableau en deux zones, l’une sombre et l’autre claire, ne reproduit pas la rassurante distribution du paysage classique entre haut et bas, entre ciel et terre. Au contraire, cette construction bipartite, plutôt qu’à les différencier, contribue à l’indistinction entre les plans. Avec cette ligne d’horizon, placée très haut, presque contre le bord supérieur du tableau, la partie occupée par les terres semble être à la fois devant et derrière, dessus et dessous, surface de sol et coupe géologique, dans une indétermination qui nous fait sans cesse reconsidérer notre regard.

Dubuffet poursuivra cette exploration de l’ambiguïté entre réel et irréel dans une suite de paysages dessinés. Il ne peut plus désormais s’en remettre au hasard de la pâte. Les pulsations du sol, à la fois physiques et mentales, sont alors dématérialisées et transposées de la matière au trait.

Exposé actuellement

La collection

Bibliographie

Valérie Da Costa et Fabrice Hergott, Jean Dubuffet, Paris, Hazan, 2006.

Max Loreau, Jean Dubuffet : délits, déportements, lieux de Haut Jeu, Lausanne, Weber, 1971.

Michel Thévoz, Dubuffet, Genève, Skira, 1986