Bibliographie
Laurence Madeline (dir.), Gustave Courbet. Les années suisses, cat. exp. Genève, Musée Rath, Paris, Artlys, 2014, p. 233 et no 69.
Jörg Zutter (dir.), en collaboration avec Petra ten-Doesschate Chu, Courbet. Artiste et promoteur de son œuvre, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Paris, Flammarion, 1998, no 68.
Pierre Chessex, Courbet et la Suisse, cat. exp. La Tour-de-Peilz, Château de La Tour-de-Peilz,1982, no 81.
L’exil à La Tour-de-Peilz inspire essentiellement à Courbet une peinture de paysage. Pourtant, l’artiste ne renonce pas complètement à la figure humaine. Renouant avec la tradition des portraits en costume traditionnels des petits maîtres suisses, il représente ici une jeune Vaudoise avec, en arrière-fond, la Dent de Jaman et les Rochers de Naye.
Le tableau montre le modèle de profil, la binette sur l’épaule, une hotte au dos et la cantine de cuivre à la main. Le corsage noir est conforme à la mode de l’époque. La blouse et le tablier se retrouvent aussi dans d’autres régions rurales. Le seul élément spécifiquement vaudois de ce costume est le chapeau « à borne ».
Avec ce sujet folklorique, Courbet espère éveiller la curiosité à Paris. Mais ses espoirs sont déçus. Son ami Étienne Baudry lui retourne la toile et lui conseille de trouver un acheteur en Suisse : « […] je vous ai retourné la Vigneronne de Montreux, j’aime mieux qu’elle soit ici chez vous qu’à Paris où les costumes suisses n’ont aucune vogue. J’étais ennuyé d’entendre dire : c’est dommage que ce soit de la Suisse. » Le tableau ne devait pas trouver d’amateur en Helvétie non plus, puisqu’il figure dans l’inventaire de la succession du peintre.
L’œuvre pourtant ne manque pas d’intérêt. La pose du modèle, ainsi que sa monumentalité – témoin la place centrale qu’occupe la manche bouffante blanche, véritable morceau de peinture avant d’être la transcription d’un tissu – transcendent toute velléité de pittoresque. La binette, dans laquelle se reflète la montagne qui, à son tour, accueille l’ombre de l’outil, tisse un lien inédit entre la réalité de la figure et l’artificialité d’un décor qui évoque les fonds peints des studios de photographie.