Bibliographie
Éric de Chassey, Pierre Soulages. Peintures 2008-2012, cat. exp. Lausanne, Galerie Alice Pauli, 2012, p. 96.
Pierre Encrevé, « Les éclats du noir [Entretien avec Pierre Soulages] », in Beaux-Arts Magazine, numéro hors-série, mars 1996.
Olivier Pauli, « Les couleurs du noir : entretien avec Pierre Soulages », in Soulages. Peintures, cat. exp. Lausanne, Galerie Alice Pauli, 1990, p. 13-21.
Après des formes sombres se détachant sur un fond clair, l’œuvre de Soulages est gagné par la couleur noire, créant de puissants contrastes. Dans un entretien avec Olivier Pauli en 1990, l’artiste se rappelle: « Un jour de 1979, je peignais et la couleur noire avait envahi la toile. Cela me paraissait sans issue, sans espoir. » Soulages se consacre alors à une série de toiles noires où la surface, composée de textures différentes, renvoie la lumière par reflets. Il invente le noir porteur de lumière, qu’il nomme « l’Outrenoir » : « Outrenoir pour dire : au-delà du noir, une lumière reflétée, transmutée par le noir. Outrenoir : noir qui cessant de l’être devient émetteur de clarté, de lumière secrète. Outrenoir : un champ mental autre que celui du simple noir », explique encore l’artiste en 1996 à Pierre Encrevé.
Les textures composant la surface sont construites par la brosse qui strie la matière en des sillons inégaux ou par la lame qui aplatit et lisse la pâte. Elles captent la lumière et la renvoient différemment, lui imposant des angles d’incidence multiples. En faisant jouer la matière noire avec la lumière, en la rendant tour à tour fine et épaisse, lisse et rugueuse, mate et brillante, Soulages tient le monochrome à distance.
Au début des années 1980, l’artiste développe sa pratique sur des formats monumentaux. Il recourt de plus en plus souvent à la forme du polyptyque, peinture composée de plusieurs châssis assemblés. Cette structure lui permet aussi de faire naître, avec les séparations entre les panneaux, une discontinuité nouvelle de la matière et de créer des vibrations supplémentaires en complexifiant le tissage de traces verticales et de traces obliques. Dans le Polyptyque J, l’association entre un format presque carré et la superposition de panneaux allongés conduit à un double regard, à la fois horizontal (élément par élément) et vertical (global).